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Skandasana (le fils de Shiva)
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Skandasana (la posture de Skanda, le fils de Shiva)

Asanas

Skandasana

Skanda est le fils de Shiva, dont la particularité est d’être né de Shiva seul. En cela, il est lié à l’abstinence sexuelle, à l’ascèse et à la chasteté. Parmi ses 31 noms différents, il s’appelle aussi Kumâra, l’adolescent.

Son père, Shiva, est le dieu des yogis, que rien ne pouvait détourner de sa méditation. Kâma, le dieu de l’érotisme, en fit les frais : alors qu’il tentait d’encourager Shiva à avoir un fils, destiné à endosser la responsabilité de chef des armées vouées à la protection des dieux, il fut réduit en cendre d’une seul regard foudroyant du troisième œil de Shiva.

Pour séduire Shiva, la déesse Parvati entra elle-aussi en ascèse, et c’est ainsi que, séduit, il ne put se contenir et envoya un jet de sa semence de vie dans le Gange, ce qui donna à Skanda son nom. Le fils de Shiva est une incarnation du dieu Shiva, il en déploie un certain aspect. Chaste et valeureux, sa seule épouse fut l’armée. Pour le yoga, Skanda représente l’abstinence et en psychanalyse, la sublimation. A mon sens, plus qu’une histoire patriarcale et misogyne où les enfants sont engendrés sans femme, il s’agit davantage de symboliser la catharsis et la sublimation – qui concerne donc les hommes et les femmes, et les principes du yoga, où en effet, la chasteté et le célibat sont conseillés pour ne pas être détourné de la pratique. Vishvamitra en fait aussi l’expérience à sa manière (voir Vishvamitrasana).

En vérité, malgré ses conseils éthiques qui constituent les deux premiers membres du yoga (yama et niyama), les dérogations à la chasteté sont nombreuses, il y a, dirait-on, une fluidité de l’interprétation. On peut bien entendu être yogi sans être célibataire. C’est plutôt l’idée de sublimation qui doit retenir l’attention. Le problème n’est pas tant la chasteté pour elle-même que les fluctuations du mental impliquées par les énergies libidinales. La libido ne laisse pas le mental en repos, cela parce que nos pulsions ont tendance à s’identifier à notre mental, que nous identifions ensuite à nous-mêmes : c’est l’enfer de la confusion. Or le yoga, nous dit Patanjali, est « l’arrêt automatique des fluctuations du mental ».

En effet, quand notre mental est investi par la libido sans cesse, nous nous confondons avec lui et donc, nous sommes déconcentrés, et bien vite, épuisés. Le yogi, puisqu’il maîtrise son corps et son mental, peut alors investir, même pendant son sommeil, cette énergie libidinale dans des fins spirituelles ou créatives. C’est la définition de la sublimation freudienne, qui est le meilleur destin de la pulsion, parce qu’elle est alors convertie, sublimée, dans des buts socialement admis  (et ici, spirituellement élevés) : le peintre, le créateur, le mystique, le philosophe qui est l’amant du vrai, tel Socrate, le réalisateur, l’écrivain, le danseur, le yogi. Shiva est alors le dieu des créateurs et des yogis, quand l’on devient artiste, que l’on pratique un art, l’on devient alors une image de Shiva, on peut donc se déifier dans ce « meilleur destin des pulsions ».

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