Parshva natarajasana

C’est parce que Kronos libère Gaïa de l’étreinte perpétuelle d’Ouranos que les créatures de la Terre ont pu sortir de son giron. Ouranos étouffait ses enfants, les empêchant de sortir à la surface. Kronos le castre, la douleur est si horrible qu’Ouranos part très haut dans le ciel. L’épanouissement sur Terre reposerait donc sur la castration du père par le fils.

Du sperme d’Ouranos dont le sexe est jeté dans l’océan, naît Aphrodite, la déesse de l’amour (cf hier). Kronos a un règne contesté de par son geste originel, c’est donc Zeus (Jupiter, cf jeudi) qui vengera Ouranos, son grand père et rétablira le Dharma, si l’on veut. En attendant que Zeus restaure une sorte de justice, après une période joyeuse, un âge d’or de Kronos, c’est le coup d’Etat permanent, comme dirait Tonton.

Néanmoins, le vivant peut se déployer sur la Terre. Les Saturnales sont l’ancêtre de notre bien aimée fête de Noël. Saturne réfugié en Italie après sa défaite est un dieu plus serein que le Kronos grec, qui, en libérant la vie sur Terre, marque aussi le temps de la corruption, du devenir, et donc de la mort. Avant Dionysos, Kronos est vie et mort.

La guerre cosmique – tuer le père – répond à une nécessité, ce que l’on voit tant dans la mythologie grecque, que dans l’un des grands textes fondateurs du yoga qu’est la Bhagavadgita, où l’enseignement de Krisna (l’équivalent du Christ), c’est qu’il faut aller à la guerre : Krisna apprend à Arjuna, qui rechigne à massacrer sa propre famille qu’il faut le faire, qu’il en va de la nécessité du monde, de la loi cosmique, de la justice, le Dharma. Agir sans rien attendre de son action : yoga.

Les créatures ne sont pas engendrées au hasard. Dans la mythologie indienne, c’est Shiva qui crée les êtres en prenant les postures qui leur sont associées : c’est pourquoi les asanas portent les noms des animaux, mais aussi des créatures organiques (la montagne, Tadasana), végétales (l’arbre, Vrikshasana), les sages, les dieux, etc. Au fur et à mesure qu’il danse les asanas, il engendre la vie. Dans la mythologie grecque, les créatures étaient les enfants d’un principe masculin (Ouranos) et féminin (Gaïa) – qui ont procréé de façon vraiment hétéronormée, sic. Shiva semble créer seul : ce n’est pas exact, dans la mesure où sans la déesse Shakti, l’énergie, Shiva ne peut rien faire. Et dans les postures de yoga, il s’agit de faire monter l’énergie de Shakti, en bas de la colonne vertébrale, jusqu’au sommet du crâne, notre voûte céleste, où Shiva et Shakti peuvent s’unir.

Nous parcourons le chemin de la Terre au Ciel, dans le monde intime et imperceptible qu’est notre corps subtil, notre corps de pensée, notre chair, sous le corps physique.

Parshva natarajasana peut suivre natarajasana de façon dynamique, afin de danser les asanas. Laissez libre cours à votre imagination, à votre sensibilité et à votre créativité. Sous la manifestation du dieu de la danse, Natarajan, dans la danse des asanas, Shiva crée le monde et nous crée. Et en nous, nous pouvons rencontrer Shiva. C’est l’une de mes postures préférées, celle qui sans doute m’a fait aimer le yoga et m’a donné à nouveau l’envie d’écrire – au sujet du yoga.